La Commission européenne insiste sur le droit au remboursement
Vols annulés
La Commission européenne insiste sur le droit au remboursement
La Commission européenne a rappelé, mercredi 13 mai, le droit des passagers à bénéficier d’un remboursement lorsque leur vol est annulé. Elle a par ailleurs adressé un rappel à l’ordre aux pays récalcitrants, dont la France, avant un lancement éventuel de procédures en infraction.
La Commission européenne a présenté mercredi un ensemble d’orientations et de recommandations visant à redresser le secteur touristique au sein de l’Union européenne (UE), très affecté par l’épidémie de Covid-19. Ce paquet « Tourisme et transports » s’intéresse notamment à la levée des restrictions aux frontières intérieures de l’UE et au rétablissement des transports et des activités touristiques. Il promeut aussi des recommandations sur les avoirs délivrés en cas d’annulation d’un séjour touristique ou d’un vol sec.
« Nous ne voyagerons pas loin si les entreprises telles que les hôtels et les compagnies aériennes ont fait faillite, souligne Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive de la Commission européenne. Et pourtant, beaucoup de ces entreprises subissent une forte pression. Elles sont prises entre la nécessité de rembourser les voyages annulés et la réalité, à savoir que les nouvelles réservations sont encore rares. » Alors si « la base est que les consommateurs européens ont droit à un remboursement en espèces, si tel est leur souhait », la Commission européenne a adopté des recommandations afin de rendre les avoirs plus attractifs, a expliqué la commissaire danoise. Les avoirs permettent en effet d’alléger la crise de liquidités à laquelle font face les entreprises.
La Commission européenne recommande ainsi, entre autres, que les avoirs distribués aient une validité minimale de 12 mois, que le remboursement des sommes non utilisées soit automatique dans les 14 jours suivant leur expiration (ou que le remboursement soit possible au bout de 12 mois pour les avoirs ayant une validité plus longue), qu’ils soient transférables gratuitement à un tiers, mais aussi qu’ils soient bonifiés par rapport à la valeur du billet payé par le passager et qu’ils puissent être utilisés auprès des différentes compagnies d’une même alliance. Et surtout, la Commission recommande aux États membres de mettre en place des fonds de garantie permettant le remboursement de ces avoirs en cas de faillite ou d’insolvabilité du transporteur ou de l’organisateur du voyage. « Le système de protection contre l’insolvabilité doit être mis en place au niveau national, soit par le secteur public soit par le secteur privé (il peut s’agir d’un fonds ou d’un assureur) », précise le texte de la recommandation. Autant d’idées préconisées par l’UFC-Que Choisir depuis le début de la crise, afin d’inciter les consommateurs à utiliser cette option, plutôt que de la leur imposer.
Une « lettre d’encouragement » aux États membres
La délivrance d’un avoir, a insisté Margrethe Vestager, doit rester un choix. Citant les consommateurs « qui ont perdu leur emploi ou qui ont dépensé l’entièreté de leur budget vacances » dans la prestation annulée, elle a annoncé que la Commission allait envoyer instamment une lettre aux pays ne respectant pas la réglementation européenne qui prévoit le choix entre un avoir ou un remboursement en espèces. C’est notamment le cas de 12 pays, dont la France, qui ont réclamé à l’Europe un changement de réglementation et laissent sans broncher leurs compagnies bafouer le droit européen.
Margrethe Vestager a d’abord expliqué que cet envoi signifiait l’ouverture d’une procédure d’infraction à l’encontre de ces 12 pays. Elle a été contredite peu après par la commissaire européenne aux Transports, Adina Valean : « Ce n’est pas une lettre signalant une infraction. Appelons cela… une lettre d’encouragement », a-t-elle rectifié. Une piqûre de rappel envoyée aux 27 pays membres et non aux seuls États récalcitrants, précise-t-elle. Mais la volonté de sévir n’a pas complètement disparu, à en croire les propos du commissaire européen à la Justice, Didier Reynders, qui a dans le même temps déclaré lors d’un entretien à la presse : « Une douzaine d’États membres semblent avoir pris des mesures contraires au droit de l’Union. Si l’État membre ne se met pas en conformité, nous examinerons les recours possibles, dont celui en infraction. » Selon une source de la Commission citée par le magazine Contexte, la réponse des États à cette lettre est attendue pour le 27 mai au plus tard. Au-delà, si la violation systématique du règlement est caractérisée, les procédures d’infractions seront lancées « probablement très rapidement », a promis Adina Valean.
Infraction ? Pas infraction ? En attendant d’être fixés sur leur sort, les États ont, en tout cas, jusqu’au 2 juin pour exposer leurs arguments à la Commission concernant ses recommandations sur les remboursements. Pendant ce temps, les consommateurs souhaitant obtenir un remboursement peuvent tenter de faire valoir leurs droits auprès des juridictions compétentes ou des compagnies aériennes. Compagnies qui n’ont pas tardé à réagir à ces recommandations. Dans un communiqué commun, Airlines for Europe (A4E), l’International Air Transport Association (Iata), Airlines International Representation in Europe (Aire) et l’European Regions Airlines Association (Era) ont, sans surprise, regretté que la Commission européenne n’ait pas modifié le règlement européen – qu’elles ont choisi de ne pas appliquer, rappelons-le. Elles ajoutent que le fait que les recommandations sur les avoirs soient non contraignantes risque de rendre la situation actuelle encore plus confuse et créer des attentes chez les consommateurs, auxquelles toutes n’auront pas la capacité de répondre.
En pratique : comment demander le remboursement
Comme l’a rappelé la Commission, les compagnies aériennes ne peuvent pas imposer un avoir. Si les conditions sont intéressantes, vous pouvez l’accepter, sinon vous avez tout à fait le droit de demander le remboursement de vos billets. Commencez par contacter la compagnie aérienne (voir notre lettre type) pour lui signifier que vous refusez l’avoir. Si vous ne recevez pas de réponse – ou une réponse négative – dans un délai raisonnable, vous pouvez introduire une plainte auprès de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) (1), chargée du respect des droits des passagers. Cette autorité doit, en théorie, vous fournir un avis juridique non contraignant sur la suite à donner à votre plainte. Malheureusement, en pratique, elle est aux abonnés absents depuis le début de la crise… Si cela ne suffit pas, il est possible de vous adresser à un organisme de règlement extrajudiciaire des litiges ou, si vous avez acheté votre billet en ligne, à la plateforme de règlement en ligne des litiges mise en place par l’Union européenne (2). Vous pouvez aussi intenter une action en justice en recourant à la procédure européenne de règlement des petits litiges (2) ou en saisissant les juridictions nationales. Dans tous les cas, n’hésitez pas à vous rapprocher de l’une de nos associations locales, qui vous guidera afin de faire valoir vos droits.
(1) Vous pouvez signaler votre litige par voie postale à l’adresse suivante :
DGAC, Direction du transport aérien, Mission du droit des passagers, Bureau des passagers aériens (MDP/P2), 50 rue Henry Farman, FR – 75720 Paris Cedex 15.
(2) https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/consumers/resolve-your-consumer-complaint_fr